Comprendre la fiscalité des placements pour les personnes physiques en Belgique
- nicolascellieres0
- 11 juin
- 6 min de lecture

En tant que contribuable belge, il est crucial de maîtriser les diverses taxes et prélèvements qui s'appliquent à vos investissements financiers. La Belgique ne dispose pas d'un impôt général sur la fortune, à l'instar de certains pays voisins, mais elle applique un ensemble de taxes spécifiques qui varient en fonction de la nature de vos placements. Cet article vous offre un aperçu complet des impôts qui impactent vos produits de placements.
1. Le précompte mobilier (PM) : L'impôt à la source sur les revenus mobiliers
Le précompte mobilier (PM) est une retenue à la source, c'est-à-dire un impôt directement prélevé sur vos revenus mobiliers avant qu'ils n'arrivent sur votre compte. C'est l'une des taxes les plus courantes pour les investisseurs belges.
Intérêts sur comptes d'épargne réglementés : Il existe une exonération annuelle et par personne pour les intérêts perçus sur ces comptes. Actuellement, les 1 050 premiers euros d'intérêts sont exemptés de PM. Au-delà de ce seuil, le taux de PM appliqué est de 15 %. Il est important de noter que cette exonération s'applique par contribuable, même si vous détenez plusieurs comptes d'épargne réglementés dans différentes banques.
Dividendes d'actions : Les dividendes que vous recevez de vos actions sont soumis à un PM de 30 %. Cependant, une mesure fiscale avantageuse permet de récupérer une partie de ce précompte. Vous pouvez demander un remboursement du PM sur les 859 premiers euros de dividendes perçus par an et par personne, ce qui représente une récupération maximale de 257 €. Il est nécessaire de déclarer ces dividendes dans votre déclaration fiscale pour bénéficier de ce remboursement.
Intérêts d'obligations et comptes à terme : Les intérêts générés par les obligations et les comptes à terme sont également taxés à 30 %, sans aucune exonération. Que ce soit des obligations d'État, des obligations d'entreprise ou des placements à terme bancaires, la fiscalité est la même.
Généralement, le PM est prélevé automatiquement par l'institution financière qui gère votre placement. Toutefois, dans certains cas, notamment pour bénéficier de l'exonération des comptes d'épargne ou du remboursement des dividendes, vous devrez mentionner ces revenus et les précomptes retenus dans votre déclaration fiscale annuelle.
2. La taxe Reynders : La plus-value sur certains fonds obligataires
La taxe sur la plus-value obligataire, communément appelée "taxe Reynders", vise spécifiquement les fonds d'investissement dits « mixtes », c'est-à-dire ceux qui combinent des investissements en actions et en obligations.
Champ d'application : Cette taxe s'applique si le fonds dans lequel vous avez investi détient plus de 10 % de ses actifs en instruments de dette (obligations, bons d'État, etc.). Dans ce cas, une taxe de 30 % est prélevée sur la partie des plus-values qui est attribuable aux intérêts capitalisés au sein du fonds. En d'autres termes, ce n'est pas la totalité de votre plus-value qui est taxée, mais uniquement la portion liée aux rendements obligataires.
Fonds concernés : La taxe Reynders ne concerne que les fonds de capitalisation (ou non-distributeurs), c'est-à-dire les fonds qui réinvestissent leurs revenus plutôt que de les distribuer. Elle s'applique au moment de la revente de vos parts de fonds.
Exonération : Les fonds purement actions, c'est-à-dire ceux qui n'investissent pas ou très peu en obligations, sont exonérés de cette taxe. Cela signifie que si vous investissez dans un fonds dont l'intégralité du portefeuille est composée d'actions, la taxe Reynders ne vous concerne pas.
3. La taxe sur les opérations de bourse (TOB) : Chaque transaction compte
La taxe sur les opérations de bourse (TOB) est prélevée sur l'achat et la vente de titres en Belgique. Elle s'applique à tout résident belge, même si les transactions sont effectuées via un intermédiaire financier étranger.
Taux variables : Les taux de la TOB varient en fonction du type d'actif que vous achetez ou vendez :
Actions : La TOB est de 0,35 % du montant de la transaction, avec un plafond par transaction (max. 1.600€).
Obligations : Le taux est de 0,12 % du montant de la transaction, avec un plafond par transaction (max. 1.300€).
Fonds d'investissement : La TOB peut atteindre jusqu'à 1,32 % pour les fonds de capitalisation, tandis que les fonds de distribution ont généralement un taux inférieur. La taxe est calculée sur le montant de la transaction, avec un plafond par transaction (max. 4.000€).
Déclaration et paiement : Dans la plupart des cas, si vous utilisez un courtier ou une banque belge, la TOB est retenue automatiquement. Cependant, si vous effectuez vos transactions via une plateforme étrangère qui n'opère pas en Belgique, il est de votre responsabilité de déclarer et de payer cette taxe. Le non-respect de cette obligation peut entraîner des pénalités.
4. La taxe sur les comptes-titres (TCT) : Quand votre portefeuille dépasse le million
Instaurée en 2021, la taxe sur les comptes-titres (TCT) est une taxe annuelle qui cible les patrimoines financiers les plus importants.
Seuil et taux : Cette taxe s'applique si la valeur moyenne de votre compte-titres dépasse 1 000 000 € sur une période de référence donnée (généralement une année). Le taux de la taxe est de 0,15 % et s'applique sur la valeur totale du compte-titres, et non pas uniquement sur la partie qui dépasse le seuil du million d'euros.
Application par compte : Il est crucial de comprendre que cette taxe s'applique par compte, et non par personne. Cela signifie qu'un compte-titres détenu en copropriété par deux personnes (par exemple, un couple) pourrait être taxé même si la part individuelle de chaque co-détenteur est inférieure au seuil d'un million d'euros. Si la valeur moyenne combinée du compte dépasse le million, la taxe s'applique.
Prélèvement : Les institutions financières belges sont responsables de la perception automatique de cette taxe, vous n'avez donc pas de démarches spécifiques à effectuer pour la déclarer.
5. La fiscalité des plus-values : Quand sont-elles taxées ?
La Belgique se distingue par une particularité fiscale avantageuse pour les investisseurs : elle ne taxe généralement pas les plus-values mobilières réalisées dans le cadre d'une gestion "normale" de son patrimoine privé.
Plus-values exonérées : Les plus-values réalisées sur la vente d'actions cotées, de parts de fonds d'investissement, d'obligations, etc., sont exonérées d'impôt si la gestion de votre portefeuille est considérée comme "prudente" et "non spéculative". Cela signifie que les investissements à long terme, basés sur des décisions raisonnables et sans recours excessif à des stratégies agressives (comme l'effet de levier important), ne sont pas taxés sur la plus-value à la revente.
Plus-values taxées dans certains cas : La situation change si votre gestion est jugée "anormale" ou "spéculative" par l'administration fiscale. Sont notamment taxées :
Les plus-values spéculatives : Celles-ci résultent d'activités de trading très actif, d'utilisation intensive de l'effet de levier ou de stratégies à haut risque. Dans ce cas, les plus-values peuvent être imposées au taux de 33 % en tant que revenus divers.
Les plus-values sur certaines actions non cotées : Des règles spécifiques s'appliquent, notamment en cas de participation importante dans le capital d'une société non cotée.
Les plus-values sur certains produits à capital garanti : Comme mentionné précédemment avec la taxe Reynders, certaines plus-values sur des fonds obligataires capitalisant des intérêts peuvent être taxées.
Vers une fiscalité renforcée des plus-values ?
Un projet de loi est actuellement à l'étude au niveau fédéral belge pour instaurer une taxation sur certaines plus-values mobilières, notamment sur les actions détenues par des particuliers. Cette réforme envisagée vise à « renforcer la justice fiscale » en imposant davantage les revenus du capital. Les modalités précises, telles que les seuils d'application, les taux d'imposition et les éventuelles exemptions, sont encore en discussion. Ce projet pourrait marquer un changement significatif dans le paysage fiscal belge pour les investisseurs. Il est donc fortement recommandé aux investisseurs de rester attentifs à son évolution et de se tenir informés des éventuelles nouvelles législations.
6. Les taxes sur les produits d'assurance (branche 21 et 23)
Les contrats d'assurance-vie, notamment les produits de la branche 21 (à capital garanti) et de la branche 23 (liés à des fonds d'investissement), sont soumis à un régime fiscal qui leur est propre.
Taxe sur la prime versée : Lors du versement de la prime dans un contrat d'assurance-vie (qu'il s'agisse de la branche 21 ou 23), une taxe d'assurance de 2 % est généralement prélevée.
Branche 21 (capital garanti) : Les revenus générés par les contrats de la branche 21 sont soumis à un précompte mobilier de 30 %, calculé sur un intérêt fictif de 4,75%. Cependant, une exonération s'applique si le contrat a une durée minimale de 8 ans ou si la couverture en cas de décès est supérieure à 130%. Si ces conditions sont remplies, les revenus ne sont pas soumis au PM à la sortie.
Branche 23 (unités liées à des fonds) : Ces contrats ne sont généralement pas soumis au précompte mobilier à la sortie, ni à la TOB.
Branche 26 : Lors du versement de la prime, aucune taxe n’est due. Les revenus générés par les contrats de la branche 26 sont soumis à un précompte mobilier de 30 %.
Conclusion :
La fiscalité des placements en Belgique, bien que n'incluant pas d'impôt général sur la fortune, est caractérisée par une multitude de taxes spécifiques : précompte mobilier, TOB, taxe Reynders, TCT, etc. Cette complexité peut rendre la matière ardue à appréhender pour les particuliers. Malgré cela, elle reste globalement favorable aux investisseurs, notamment grâce à l'absence d'imposition générale sur les plus-values réalisées dans le cadre d'une gestion normale. Une bonne structuration de votre patrimoine et un accompagnement professionnel (par un conseiller financier ou un expert-comptable) sont des atouts majeurs pour concilier au mieux rendement de vos placements et optimisation fiscale, tout en respectant scrupuleusement la réglementation en vigueur.
Rédaction le 10 juin 2025 par Nicolas Cellières, Planificateur financier
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